CHAVILLE ENCHERES

Non,

" Le Fer ne demande pas à être un accessoire, c'est un ornement.  ", et un ornement ô combien difficile à réaliser...

Tout est mêlé dans le travail du fer forgé. Il y a d'abord le rêve, la poésie, l'imagination, dans le silence de l’atelier, puis vient la minutie du dessin et enfin la dextérité face à la matière qui se tord, qui vit, qui se défend. Le fer et le feu, tour à tour, luttent et s'unissent avec,  pour ennemie commun, le temps, qui va trop vite et oblige l'artisan, l'artiste, à une maîtrise absolue de son art et le temps qu'il fait dans la fonderie, fait-il trop chaud, le fer se dilate, fait-il froid, le voilà qui se rétracte. Rien n'est simple, la facilité, durant tout le travail d'exécution ne sera jamais au rendez-vous.

Mais, au final, voici qu'apparaissent des volutes, des spirales, des feuilles, toute une poésie de mouvements figés qui défient le temps.  Tout un souffle aérien où la délicatesse défie la force.  Pour l’éternité.

Il est, en France, un grand maître incontesté du fer forgé c’est Gilbert POILLERAT.

A notre vente du 9 février vous sera présentée une salle à manger complète, comprenant une enfilade, une table et six chaises à l’ornementation si riche de feuilles de lierre et de volutes, d’enroulement et de spirales, que devant la complexité des motifs et la qualité d’exécution parfaitement maîtrisée, comment ne pas songer au Grand maître du fer forgé Français ?

Il est des éléments tellement ancrés dans notre quotidien qu’on n’y prête plus vraiment attention. Prenez par exemple le Palais de Chaillot. Certes on s’extasie encore devant ce remarquable ensemble néo classique édifié en 1937 pour l’exposition internationale de Paris. Mais sait-on que les grilles en fer forgé qui forment sa porte d’entrée portent la signature d’un célèbre Boulliste ? Son nom est Gilbert Poillerat (1902-1988). Après une formation aux Beaux-Arts, il entre à l’école Boulle où il suit une formation de forge et de ciselure, avant de s’orienter vers la ferronnerie. Il fait ensuite ses classes chez le célèbre ferronnier d’art Edgar Brandt au département ferronnerie décorative et commence à créer sous nom au début des années 30. Escaliers, portes, tables, lampadaires, nous sommes sans le savoir entourés du travail de Poillerat. « Un artiste contemporain inattaquable qui a produit une œuvre toute en modestie, intelligence et composition » pour le designer Philippe Boisselier qui a eu la chance de l’avoir comme professeur aux Arts déco. Parmi les nombreuses réalisations du maître, on peut citer les célèbres grilles du collège Jules Ferry à Maisons Alfort qui évoquent tour à tour les Sciences, les Arts ou l’Histoire. Il est aussi l’auteur d’une suite présidentielle à l’Elysée, de la porte en bronze de la piscine du Normandie ou encore des balustrades extérieures du restaurant de la Tour Eiffel réalisées en 1937.

Une œuvre importante d’où se dégage une poésie unique et qui fait de Poillerat le créateur français de ferronnerie le plus influent du XX^e siècle.

Pour en savoir plus du Gilbert Poillerat :

Gilbert Poillerat : maître ferronnier aux éditions Charles Moreau - Source Ecole Boulle

En 1939 et 1945, l'Union des artistes modernes et le Salon des arts ménagers cessent leurs activités mais le Salon des artistes décorateurs veut se maintenir et un évènement naît en 1940 : le Salon de l’imagerie, associé à la précieuse revue en couleur Images de France - apparition singulière alors que le papier manque... Car les temps sont déjà ceux du cinéma, du visuel s'insérant dans la mode vestimentaire et dans le mobilier. Cette revue donne une juste idée de la création sous l’Occupation et montre la renaissance de l'ancienne génération des artistes décorateurs. Leur élitisme s’associe alors à l’idéologie d’un épanouissement individuel de l’ouvrier dans un savoir-faire de prestige, un travail artisanal qui s’oppose à la frustration de l'ouvrier spécialisé ne voyant pas la finalité de sa tâche : détournement de l’argument socialiste de William Morris car il s’agit là d’intérêts bien particuliers ! La Compagnie des arts français publie dans cette revue une déclaration pleine-page : "la tradition française est de créer", les décorateurs signataires - Adnet, Arbus, Dominique, Jallot, Leleu, Pascaud, Printz, Prou, Rousseau et Lardin - sembler résister à l'Occupant en refusant d’être passéistes. De biens grands mots car les articles prônent la tradition ("perdue" pendant la crise de 1928-38) et s'opposent au modernisme, à la démocratisation. L'artisan prend plaisir en travaillant uniquement pour une richissime élite... Même si les ouvrages semblent ridicules dans le cadre désert du "Palais de New-York" en 1942, où se tient le Salon des artistes décorateurs et où l'on stocke en sous-sol les biens juifs réquisitionnés. Que découvre t'on ? On vante le retour de la ferronneries d’art d'un Gilbert Poillerat et la précieuse marqueterie d'un Jules Leleu. Le seul souci réaliste se limite aux difficultés d’approvisionnement (bois exotiques, tissus) ou aux réquisitions pour l'armement (métaux, solvants), Jean Royère imagine donc un "grenier aménagé sans bon d’achat" faisant de ces contraintes un levier d’action. On découvre aussi le brutalisme "premier" des meubles monoxyles d’Alexandre Noll et l'ambiance autoritaire et rustique d’une maison de campagne décorée par Maurice Jallot. Le style de l'Occupation est dans ce mélange singulier de luxe, d'élitisme et de populisme, il nous montre comment les frustrations sont instrumentalisées derrière la promesse du "bien du peuple" pour finalement servir l'intérêt d'un petit monde de privilégiés...

Source : l'artisan de Poillerat, Images de France juillet 1943

Bibliographie :

- François Baudot, Gilbert Poillerat Maître Ferronnier, Edition Hazan, Paris 1992

- Gilbert Poillerat : maître ferronnier aux éditions Charles Moreau

 Un résultat de vente :

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TRAVAIL FRANCAIS 1940-1950 Table de salle à manger

Estimation: 6000  - 8000 €

Sold for 7,650 €

ARTCURIAL

Date: 2 Jun 2009 20:00